

les FEMMES DÉTECTIVES
par Maderose
Les femmes détectives, vaste question. Soyons honnête, quand on nous demande de citer le premier personnage détective qui nous vient à l’esprit, on pense majoritairement à Sherlock Holmes, Hercule Poirot ou encore Détective Conan. Que d’hommes ! Enfin, non. Je suis mauvaise langue. Les fans du genre réussiront toujours à nous citer des grandes dames tenant le rôle de détective. À commencer par Miss Marple. Alors voyons ça d’un peu plus près : quelles femmes pour le rôle de détective, et pourquoi ?
Pour commencer, il faut qu’on se mette d’accord sur ce qu’est le genre policier. Je ne vais pas vous faire un article là-dessus (Mio est à votre service pour répondre à la question !) mais je vais me contenter d’une petite définition simple de mon cru : « le ou les personnages principaux enquêtent sur un crime ou un délit ». Et, évidemment, je vais surtout m’arrêter sur les œuvres dans lesquelles le ou les protagonistes sont des femmes. Les ouvrages que je vais citer sont une liste non-exhaustive des femmes détectives de la fiction littéraire et audiovisuelle.
Au début de mes recherches, je pensais que les détectives de sexe féminin étaient rares dans la fiction. Eh beh pas tant que ça ! Évidemment, elles ne sont pas les premières à nous venir en tête, ou alors on pense aux duos policiers, très courants dans ce genre surtout dans les séries télévisées : Castle, Bones, Broadchurch, Elementary (quoique là, c’est encore autre chose) ou Chérif ou Caïn en France. Oui, il y a des femmes détectives (ou presque) mais il y a toujours le mâle dans le champ. Alors, ok, les mâles, c’est cool. Je ne vais pas dire le contraire. Mais le girl power, c’est important aussi !
Il y a une nette augmentation des protagonistes féminins dans le domaine policier depuis ses débuts, mais je ne vais pas faire de rapprochements selon les époques de diffusion ou publication. Je vais me contenter de classer les types de femmes détectives protagonistes selon certaines œuvres.
L’analyse que je vais proposer du protagoniste féminin dans le genre policier va se découper en deux grandes images que j’ai pu remarquer lors de mes recherches : les enquêtrices policières (agents de police, du FBI, lieutenants, commandants, etc.) et les enquêtrices amateurs !
Pourquoi j’ai décidé de séparer dans ces deux catégories puisque j’ai pu remarquer que selon leur statut, elles sont traitées différemment. On va donc commencer par les enquêtrices « pro », celles qui font partie d’une organisation gouvernementale. Je l’ai déjà précisé, je vais utiliser un nombre restreint d’exemples ; pour cette catégorie, je vais prendre : le lieutenant Eve Dallas de la série de romans du même nom écrits par Nora Roberts, le commandant Vivienne Deering de la série télévisée No Offence, Jane Rizzoli partageant l'affiche dans la série télévisée Rizzoli & Isles ; dans le même domaine télévisuel, de manière différente dans l’intrigue, nous avons Catherine Chandler dans Beauty and the Beast. En matière d’agents du FBI, Alex Parrish dans Quantico et Abbie Mills dans Sleepy Hollow nous seront utiles.
Je vais m'arrêter là pour l’instant puisque ces enquêtrices sont particulières. L’une des premières choses à remarquer, c’est qu’elles sont majoritairement brunes. On ne croirait pas, mais ça a tout de même son importance. Il semblerait qu’une préférence pour les jeunes femmes jolies et brunes soit de mise dans les productions policières mettant en scène des enquêtrices majoritairement seules dans leurs investigations. Alors, pourquoi ? Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il s’agit d’une constante ou d’un cliché puisqu’il y a toujours quelques contre-exemples, comme Vivienne Deering dans No Offence, qui arbore un carré blond. Mais bon, quand même. On ne peut pas passer à côté d’un certain cliché présent aux débuts du roman policier.

Au début de ceux-ci, la pin-up était un point de vente majeur : la jeune et jolie blonde pulpeuse, armée et dangereuse pour le héros (ce qui n'empêche pas la brioche). Alors, peut-être que la (toujours jeune et jolie) brune veut venir casser ce côté pin-up qui a initialement l’image d’une bimbo écervelée dont le rôle est de nuire au héros. Là, au contraire, la brunette se place au centre de l’intrigue et dénote un caractère intelligent, déterminé, et elle n’a pas peur de s’imposer face à une gent masculine qui tente de lui mettre des bâtons dans les roues. Je pense surtout ici à Alex Parrish, dans Quantico, qui exprime bien cette supériorité par rapport à ses camarades et mêmes ses supérieurs masculins.
Et alors, si l'enquêtrice n’est pas une brune (ou une blonde) badass qui écrase les hommes de son escarpin… elle peut être quoi d’autre ? Eh bien c’est simple. Si elle ne répond pas au standard énoncé plus haut : elle devient comique. Pour le spectateur/lecteur, principalement. Ici, on va prendre l’exemple de deux héroïnes de séries télévisées, l’une américaine et brune, Angie Tribeca et l’autre française et blonde, Candice Renoir.
Ce qui fait la particularité de ces deux enquêtrices, c’est que leur univers sériel n’est pas uniquement à vocation policière mais également comique. En effet, la volonté des créateurs de ces séries est de mettre en avant les qualités parfois dépréciées des protagonistes féminins en les entourant de caractères et de réactions loufoques, qui paraissent complètement contradictoires alors qu’ils finissent par payer. Il s’agit, au fond, d’une autre manière de tromper le spectateur en lui faisant croire que le cliché qu’il connait se produira alors qu’au final… eh bien non !
Alors, cette vague comédie dans le genre policier lorsque le détective est UNE détective n’est pas nouvelle. On peut très facilement rapprocher l’étrange comportement un peu à côté de la plaque de Candice Renoir à celui de Miss Jane Marple (oui, rapprocher en forçant un peu, d’accord). Mais lorsqu’on voit que l’enquêtrice du sud de la France ne cherche pas à paraître plus futée que les autres auprès des gens pour ne pas éveiller leur soupçons et les faire parler plus facilement, on retrouve bien la patte d’Agatha Christie qui nous présente une vieille dame que tout le monde croit sénile et folle alors qu’elle cache des talents d’experte ! C’est toujours un régal pour le lecteur ou le spectateur qui est la plupart du temps dans la confidence.
Cependant, la différence entre Candice et Jane se trouve dans le fait que l’une fait concrètement partie des forces de l’ordre alors que l’autre… beaucoup moins. Miss Marple est probablement la première femme détective amateur (j’entends par là qui ne fait pas partie de la police, du FBI, de la CIA ou de tout autre service gouvernemental et qui ne possède pas non plus d’accréditation pour exercer le métier de détective) à avoir une place importante dans l’historique des personnages de fictions policières.
Ce qu’il est important de noter avec les détectives amateurs, c’est que ce statut les rend plus libres dans leurs actions, leurs caractères, leurs hobbies, etc. Même en matière d’âge ou d’univers, c’est beaucoup plus ouvert, alors qu’une femme policière ne peut pas exister au XVIIIe siècle. Cela serait un anachronisme pur et simple – sauf si vous trouvez vraiment une excellente raison... mais bonne chance.

Aussi, dans ce cas, et avec les fictions sélectionnées, nous trouvons beaucoup de divergences. Nous pouvons aller de Veronica Mars, une jeune lycéenne du XXIe siècle éprise du métier de détective grâce à son père, à Sally Lockhart – de l’auteur Philip Pullman –, une jeune femme vivant dans le Londres du XIXe siècle et élucidant des mystères liés à sa vie privée en passant par Jessica Fletcher, personnage emblématique de la télévision des années 1980-1990, professeur de littérature anglaise à la retraite et auteure de romans policiers. Qu’elles soient adolescentes ou plus âgées, les détectives amateurs de la fiction policière ont un point commun (que l’on retrouve un peu mais moins chez leurs comparses que j’ai déjà citées) : elles envoient balader les agents légitimes souvent masculins en leur volant la vedette.
C’est quelque chose de vraiment récurrent : les femmes menant les enquêtes semblent toujours devoir prouver à leurs homologues masculins qu’elles sont meilleurs qu’eux. C’est parfois volontaire, et parfois non.
Je vais m’expliquer en vous fournissant quelques exemples plus ou moins connus. Pour commencer, l’une des séries de romans pour la jeunesse qui a fait la renommée de la Bibliothèque Verte de la maison Hachette, Alice Détective, met en scène une jeune adolescente modeste qui ne cherche ni reconnaissance, ni une émancipation folle de son statut de femme – on est dans les États-Unis des années 1930. Malgré cela, bien que dans les romans elle accepte et se complaise dans son statut de jeune fille de bonne famille, Alice Roy est la première détective pour la jeunesse qui a osé montrer son indépendance et son intelligence dans un métier initialement réservé à la gent masculine.
Enfin… ça se passe aux États-Unis. Autant dire un pays relativement conservateur qui n’aime pas trop mettre à mal les principes instaurés, surtout à l’époque. Si nous nous penchons sur la question, nous pouvons nous retrouver en Australie, sous un régime européen de par son statut de colonie de Grande-Bretagne. Phryne Fisher, des romans Phryne Fisher Historical Mysteries, par Kerry Greenwood (qui ont été adaptés en série télévisée sous le titre Miss Fisher’s Murder Mysteries) est une jeune femme qui s’épanouit, après la guerre, dans les folles années 1920, et qui met à profit son ouverture d’esprit et sa grande intelligence pour déjouer les malfaiteurs qui croisent sa route. Contrairement à Alice, Phryne a véritablement pour but de montrer son indépendance. Elle vit à peu près à la même époque que l’adolescente américaine, mais il y a une flagrante différence de traitement entre les deux univers. Cela est peut-être dû au fait que l’une des séries a été écrite à la même époque que celle de l’intrigue alors que l’autre écriture est plus tardive.
Ainsi, l’affrontement entre la femme et l’homme, la femme et les préjugés est très fort dans les fictions policières. Du moins, celles que j’ai pu évoquer. Qu’elle soit légalement enquêtrice, ou détective amateur, la femme dans le domaine policier doit se battre pour avoir ce statut. Quel que soit l’époque ou l’univers qui entoure son intrigue. Il faudrait faire une recherche plus approfondie de toutes les œuvres dans lesquelles une femme détective tient seule le premier rôle pour bien étayer cette théorie. Elle semble pourtant bonne à prendre.
Maderose
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