
Les 5 légendes françaises
à ressortir pour Halloween
Elodye H. Fredwell
Halloween est ma fête de l’année préférée. Et pour l’occasion, je vous propose de (re)découvrir des légendes 100 % made in France. Du Varou à la Bête du Gévaudan en passant par le lore de la Dame Blanche, c’est parti pour frissonner !
Le Varou
“Entre Noël et la Chandeleur, toute bête est en horreur.”
En Normandie, il existe une légende qui se rapproche de celle du loup-garou et qui sévit surtout en fin d’année. Elle raconte que dans la ville de Gréville, près de Cherbourg, le meurtre d’un habitant à coups de hache éveille de nombreux soupçons. Commis en plein jour, dans une maison reculée du vallon. À cette époque, l’Église avait un rôle immense dans la justice. Trois dimanches de suite, un sermon fut prononcé pour inviter les témoins ou les coupables à se montrer au nom de Dieu. Il est dit qu’à la fin de la troisième lecture, le prêtre a jeté son cierge et a marché dessus pour l’éteindre. “Tout est consommé”, a-t-il dit. “Les auteurs du crime, les témoins qui ne sont pas déclarés sont rejetés de l’Église.”
Dans ce même webzine


L’excommunication sème la panique dans le village. Un homme, notamment, est inquiet : Gliauminot est un témoin indirect de ce crime. Une nuit, il sent quelque chose se jeter sur lui. Soudain, il a une envie irrépressible de courir sans s’arrêter. À chaque carrefour, il se fait frapper de sept coups de fouet, sans jamais voir l’assaillant. Le matin, il se réveille brisé, éreinté, les mains ensanglantées. Quelqu’un lui demande s’il ne portait pas le varou et il avoue que oui, c’est exactement ce qu’il se passe. Il demande à son ami s’il saurait quoi faire s’il le croisait sous sa forme de loup. “Oui, il faudrait sauter sur toi et te faire du sang entre les deux yeux.” Gilauminot fit sa peine jusqu’à la Chandeleur, sans qu’il soit arrêté. Les meurtriers n’ont jamais été retrouvés.
L’histoire du varou remonte très loin dans les légendes de la région. Les excommunications terminaient souvent sur ces paroles : “Que le coupable soit loup”. Cela ne signifiait pas qu’il allait se transformer, mais plutôt qu’il serait chassé comme un loup. Il est raconté que le varou est représenté par une personne recouverte de la haire d’un loup et méconnaissable ; un visage déformé par la haine et la souffrance. C’est une punition qui dure jusqu’à sept semaines. Si quelqu’un tue le varou, il empêche la punition du témoin et voit des malheurs s’abattre sur lui et sa famille. Pour délivrer une personne qui porte le varou, il faut le saigner de façon très précise entre les deux yeux ou attendre la fin du châtiment.
Je finis cette histoire par cette phrase que j’ai beaucoup aimée : “Les malheureux varous ne sont coupables que de ne pas avoir révélé un crime connu d’eux.” Une légende qui fait froid dans le dos…
Le comte de Saint-Germain
L’une des plus célèbres légendes de France est celle du comte de Saint-Germain. Ce dernier est connu pour être un très grand alchimiste et pour avoir (apparemment) découvert le secret de l’immortalité. Pas question de parler de pierre philosophale (qui est française de base également), mais bien de la capacité à vivre longtemps. Très longtemps…
Sa vie est déjà un grand mystère. Nous ne savons pas où il est né, ni même avec exactitude qui sont ses parents. Nous ne savons pas vraiment comment il est arrivé à être si proche de la cour du roi Louis XV, ni pourquoi il était tant apprécié par Marie-Antoinette. C’était un homme qui aimait voyager, qui maîtrisait plusieurs langues et dont la fortune était très élevée, sans que personne n’en connaisse l’origine. Aujourd’hui encore, ce personnage historique soulève de nombreuses questions, dont celle-ci : se pourrait-il qu’il soit encore en vie ?
Ce qui a contribué à rendre cette rumeur très réelle est son conflit avec le duc de Choiseul. Principal ministre de Louis XV, il décide de lancer une campagne visant à discréditer son rival. Il paie un comédien, avec l’aide de partisans : Gauve. Ce dernier doit imiter le comte de Saint-Germain, déjà suspicieux pour de nombreuses personnes, et se faire passer pour lui. Gauve prend la place du compte dans les réceptions et les salons pour raconter des histoires improbables. Il invente notamment une relation amicale avec Alexandre le Grand ou encore une rencontre avec Jésus.
La supercherie prend vite fin quand Gauve est reconnu. Alors que Choiseul s’attendait à des remontrances et une vengeance de la part du compte, il n’en est rien. Le compte ne se sent pas ridiculisé, mais prend la mesure de la situation. Il s’en inspire et en ressort vraiment grandi.
Mais les rumeurs ne s’arrêtent pas. Le compte semble vivre mille vies après cet incident. Il participe à la Guerre de Cent Ans, pendant laquelle Choiseul intercepte ses courriers et le fait passer comme traître auprès du roi. Saint-Germain se trouve obligé de fuir. Il en vient à participer au coup d’État qui détrône Pierre III de Russie. Plusieurs fois, il est raconté qu’il prédit des grandes tragédies, comme la Révolution Française et la fin de la monarchie. Il est dit également qu’il a fait preuve de certains dons, sans doute liés à l’alchimie.
Selon certains écrits, des témoins affirment l’avoir croisé alors qu’il était déclaré mort. La rumeur de son immortalité est alimentée par le fait que le comte lui-même ne connaissait pas son âge au moment de son décès. Le comte est-il encore en vie aujourd’hui ? Le mystère demeure entier…
Barbe Bleue
“Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?”
Cette phrase, tout le monde la connaît. Elle est tirée du très célèbre conte Barbe Bleue, écrit par Charles Perrault. Pour ceux et celles d’entre vous qui ne se souviennent pas de cette histoire, elle raconte la romance improbable entre Barbe Bleue et l’une de ses voisines. Cette dernière, attirée par les richesses de l’homme, va faire la découverte d’un terrible secret : aucune de ses précédentes épouses n’a survécu à leur idylle et pour cause ; elles ont toutes été tuées. Leurs corps reposent dans un cabinet secret, fermé à clé, que la jeune épouse n’avait pas le droit d’ouvrir en l’absence de son mari. Découvrant cette trahison, Barbe Bleue décide de la tuer, mais elle gagne du temps en demandant à prier. Elle attendait en réalité ses frères, qui finirent par arriver pour tuer Barbe Bleue avant qu’il ne s’en prenne à son épouse.
L’histoire n’est pas sortie de l’imagination de Charles Perrault par hasard. Paru en 1697, ce conte est inspiré du roi d’Angleterre Henri VIII (1491-1547) qui a eu 6 épouses. Certaines moururent naturellement, d’autres divorcèrent et d’autres furent exécutées.
Dans les Pays de la Loire, le Château de Tiffauges est souvent appelé “Château de Barbe Bleue”, bien que le personnage de fiction n’y ait jamais vécu. Ce surnom a été donné au lieu en référence à Gilles de Rais, son plus célèbre propriétaire. D’ailleurs, ce personnage historique aurait également pu servir d’inspiration à Charles Perrault. En effet, il était tristement connu pour effectuer de nombreuses expériences alchimistes dans son château, ainsi que pour ses crimes infanticides… Un charmant personnage, n’est-ce pas ?
La légende de Barbe Bleue est un grand classique du folklore français et de la littérature. Impossible de passer à côté pour cette liste !
La Bête du Gévaudan
Qui ne connaît pas la Bête du Gévaudan ? Cette légende fascine encore aujourd’hui, surtout par la terreur qu’elle évoque. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas une créature légendaire, qui ne trouve refuge que dans les histoires. Elle a réellement existé et a causé un vrai bain de sang pendant 3 ans, de 1764 à 1767 en Lozère.
L’histoire naît à Langogne, actuelle Lozère et anciennement le Gévaudan, quand une femme se fait gravement blesser alors qu’elle garde son troupeau. Des témoins ont tout vu : alors que la rumeur du retour des loups dans la région s’étend, ils sont affirmatifs. C’est une bête bien plus imposante qu’ils ont vue ce terrible jour de juin 1764. Une bête à peu près aussi grosse qu’un âne, avec des crocs acérés, un pelage gris teinté de rouge et une mâchoire puissante. Plus tard, c’est une adolescente qui subit le courroux de la bête et meurt de ses blessures. La première victime.
Alors que la bête fait une centaine de victimes en trois ans, les descriptions des habitants, fous de peur, ont de moins en moins de sens. Certain·e·s parlent d’homme croisé avec un loup, ce qui aurait pu contribuer au mythe du loup-garou. D’autres parlent d’un cannibale couvert d’une peau de loup. Le loup gigantesque est tout de même l’image qui est restée dans les mémoires.
Malgré les battues, les recherches, les pièges, la bête n’a jamais été tuée ou capturée. Jusqu’au 20 septembre 1765. Un grand canidé est tué et tout le monde est persuadé que c’est la bête qui a été exécutée. C’était compter sans les attaques qui reprennent jusqu’en juin 1767. Cette fois, un autre grand canidé a été mis hors d’état de nuire. Les attaques cessent aussitôt et le calme reprend. Il continue de fasciner : sa véritable nature est toujours un mystère aujourd’hui, 300 ans après les faits.
La Dame Blanche
La Dame Blanche est une légende très connue partout dans le monde. Mais saviez-vous que nous avions nos propres histoires sur ce lore en France ?
Il existe de nombreuses apparitions similaires, mais celles sur lesquelles je me concentre, ce sont les Messagères. Ces Dames Blanches, sous des apparences spectrales pour le plus souvent, se rapprochent des contes autour des banshees, des créatures irlandaises qui annonçaient la Mort en criant. Le plus souvent, les Messagères venaient dans les familles princières pour annoncer le décès d’un membre de la famille dans les trois jours. Chaque famille avait plus ou moins sa Dame Blanche attitrée. Selon certains écrits, certaines ne criaient pas et tentaient de protéger les membres de la famille menacés. D’après les témoins, une Dame Blanche serait apparue à Charles Quint en 1558, la veille de sa mort. Louis-Ferdinand de Prusse aurait également croisé la route d’une Messagère avant de mourir. De même pour Sissi l’Impératrice : elle affirmait avoir vu une Dame Blanche, 11 jours avant son assassinat.
Aujourd’hui, le mythe de la Dame Blanche continue de fasciner. Les propriétaires de certains châteaux français (comme ceux de Honenbourg, de Landreville, de Rouelbeau ou encore de Puymartin) affirment qu’une Dame Blanche rôde encore dans leurs couloirs. Elle serait là pour garder un trésor caché dans l’édifice ou pour protéger le lieu d’autres spectres malveillants.
Il se pourrait que les Dames Blanches ne soient pas seulement présentes dans des châteaux. Elles apparaissent également au bord des routes en tant qu’autostoppeuses. Leur but est assez mystérieux : certains disent qu’elles veulent prévenir les automobilistes que leurs corps sont encore présents sur les lieux de l’accident, d’autres qu’elles veulent trouver un moyen de fuir ces lieux qu’elles ne cessent de hanter. Le scénario le plus fréquent chez les témoins est qu’ils la laissent monter dans leur véhicule, mais qu’elle disparaît en hurlant à l’approche d’un endroit dangereux (sans doute le lieu de sa propre mort).
Cette légende urbaine est reprise régulièrement dans des films et des séries. Elle s’exporte dans tous les pays du monde comme créature annonciatrice d’un danger imminent.
Du mystère, des histoires effrayantes… La recette idéale pour une soirée d’Halloween parfaite ! Connaissez-vous toutes ces légendes ? Joyeux Halloween !
Sources :
-
Varous, Fantômes et Dames Blanches - Le Varou - normandie-heritage.com
-
Contes populaires et légendes de Normandie, Richesse du folklore de France, Les presses de la Renaissance, Paris (1975)
-
Contes populaires de toutes les Normandie, Michel Hérubel, Éditions Ouest-France (1998)
