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Fantastique, Fantasy, merveilleux : quelles différences ?,

 

par Mélany Bigot

Ah l’imaginaire ! Ce vaste domaine de la littérature (et pas que !) dans lequel on peut trouver de nombreux genres et sous-genres, et dans lequel on plonge avec délice pour oublier le métro, le travail, les tracas de la vie. Il existe des dizaines et des dizaines de genres différents et il serait beaucoup trop long pour moi (et peut-être un peu soporifique pour vous…) de tous les énumérer. J’ai choisi de jeter mon dévolu sur trois des genres principaux de l’imaginaire : le fantastique, la fantasy et le merveilleux.

Des genres à ne pas confondre

Nombreux sont les lecteurs à se tromper en voulant parler du dernier livre qu’ils ont lu : « J’ai fini un super roman fantastique, Le Trône de Fer ! ». Pardonnez l’exemple, c’est le premier livre que j’ai vu dans ma bibliothèque. Donc oui, Le Trône de Fer est bien un roman, mais on ne peut pas le ranger dans la catégorie du fantastique. Non, cette œuvre de George R. R. Martin trouve sa place dans le genre de la fantasy.

En vérité, les termes fantasy et fantastique sont souvent confondus par le grand public, notamment à cause de leurs sonorités proches. Pourtant, « fantasy » ne signifie pas « fantastique », mais « imagination » en anglais. Ces deux genres ont bien évidemment des similitudes, mais leurs codes restent relativement différents.

 

Il en va de même avec le merveilleux, ce grand genre ancestral, mais souvent oublié par le public. Généralement, les lecteurs ont tendance à cataloguer chaque roman imaginaire de fantastique, voire de fantasy, puisque ceux-ci sont des synonymes à leurs yeux. Mais qu’en est-il du merveilleux, le genre propre aux contes ?

 

Il était une fois, le merveilleux

 

Commençons par le plus ancien, celui que l’on retrouve dans beaucoup de récits du Moyen Âge. Le merveilleux est un genre qui englobe les mythes et légendes païens et religieux, puis par extension les contes de fées, les fables et les épopées. Son nom découle du latin « mirabilia », « choses étonnantes ».

 

Une histoire du registre merveilleux se déroule généralement dans notre monde, sauf que des événements surnaturels s’y produisent, et ce sans qu’aucune explication ne soit donnée au lecteur. Pour les personnages, tout est parfaitement normal. Des dieux qui viennent confier au héros une quête dangereuse et initiatrice ? Ok, normal. Une bête qui vit dans un château avec une rose magique ? Un peu bizarre, mais ça passe. Un chat qui parle et qui porte des bottes ? Pourquoi pas !

 

Bref, vous l’aurez compris, dans le genre du merveilleux, il peut se passer tout et n’importe quoi, les personnages ne seront jamais choqués.

 

Autre caractéristique que l’on retrouve dans presque toutes les histoires merveilleuses, les événements se passent toujours dans un passé non défini et dans une contrée assez vague. Voilà pourquoi les contes de fées commencent par la célèbre mention : « Il était une fois, dans un pays lointain ». Le cadre spatio-temporel est volontairement flouté, pour que le lecteur se dise quelque chose du style : « Ça s’est passé il y a tellement longtemps, si ça se trouve, c’est une vraie histoire, on ne sait jamais ! ».

 

Quelques œuvres merveilleuses à découvrir ? Riquet à la houppe de Charles Perrault, Micromégas de Voltaire, le mythe de Psyché et Éros (qui pourrait avoir inspiré un conte très très connu…), les Contes de la rue Broca de Pierre Gripari, Jean sans peur, et bien entendu, le fabuleux recueil Grimm en tout genre.

 

Le fantastique : à la limite du réel

 

Bon, entrons dans le vif du sujet, puisque ce webzine est consacré au fantastique. Comme pour le merveilleux, ce genre fait appel au surnaturel, mais d’une façon totalement différente.

 

Le fantastique est bien plus récent que son acolyte, puisqu’on estime qu’il découle du roman gothique anglais de la fin du XVIIIe siècle. Le genre met plus longtemps à arriver en France, et c’est surtout la traduction des contes d’Hoffmann au début du XIXe siècle qui fait découvrir au public français la littérature fantastique.

 

Les histoires du registre fantastique se déroulent dans un cadre réel, où la magie n’est pas censée exister, et dans lequel un élément surnaturel est introduit. Contrairement au merveilleux, les personnages ne considèrent pas comme normaux les événements qui se produisent. Objets qui s’animent, créatures mystérieuses, fantômes… Tout est perturbant et provoque une perte de repères chez le lecteur et le protagoniste.

 

Souvent, le récit fantastique est ambigu, on ne sait pas si l’événement surnaturel s’est réellement produit ou non. Le héros est bouleversé par ce qui lui arrive, il refuse ou est effrayé par ce qui se passe autour de lui.

 

Parmi les œuvres fantastiques, je vous conseille Le Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde, La Peau de chagrin de Balzac, Le Diable amoureux de Cazotte, Les Tribulations de Lady Grant de J. James et The Mist de Stephen King.

 

La fantasy : le digne descendant des mythes

 

Il est difficile de trouver les origines de la fantasy, car ce genre se confond beaucoup avec le merveilleux. Il semblerait que ce que l’on qualifie aujourd’hui de fantasy découle de l’œuvre de l’auteur du XIXe siècle George MacDonald, notamment de son roman La Princesse et le Gobelin. Mais l’une des œuvres les plus emblématiques de la fantasy ayant contribué à en forger les codes est bien entendu celle de l’auteur J. R. R. Tolkien, père du célèbre Seigneur des Anneaux.

 

En bien des points, la fantasy ressemble au merveilleux, mais certaines de ses caractéristiques se rapprochent du fantastique. On pourrait presque dire que ce genre se situe à l’intersection des deux premiers, presque comme un mélange.

 

Un roman fantasy peut se dérouler dans notre monde comme dans un monde imaginaire, généralement un univers parallèle comme dans la saga Narnia ou dans la série Tara Duncan. La magie et le surnaturel y sont présents ; ils peuvent provoquer de l’étonnement de la part du héros, qui ne considère pas tout comme parfaitement normal, comme dans le merveilleux. Souvent, le protagoniste découvre ces éléments magiques en même temps que le lecteur. Mais cela n’est pas traité de manière angoissante ou horrifique, comme dans la littérature fantastique.

 

La plupart du temps, les œuvres fantasy s’appuient sur des mythes et légendes. On y retrouve le bestiaire du merveilleux (licornes, fées, dragons, loups-garous…). Si ces bêtes sont parfaitement acceptées dans les contes, les choses sont différentes dans la fantasy, car souvent, les personnages seront étonnés de croiser la route de telle ou telle créature. Il suffit de voir les réactions de Harry Potter dès sa rencontre avec Hagrid !

 

Difficiles de faire un choix dans des œuvres de fantasy à vous conseiller… Je dirais L’Épouvanteur de Joseph Delanay, Percy Jackson de Rick Riordan (et toutes les séries dérivées), Les Chroniques de la Tour de Laura Gallego Garcia, Magyk d’Angie Sage et Fablehaven de Brandon Mull.

 

 

Donc voilà, j’espère que vous aurez saisi la différence entre fantastique, fantasy et merveilleux, qui n’est pas toujours facile à intégrer. J’avais déjà fait des recherches pour tourner un podcast sur le sujet, mais une piqûre de rappel ne fait jamais de mal. Et si vous souhaitez aller plus loin concernant ces registres littéraires, je vous conseille ces fabuleux ouvrages : La Grande Encyclopédie du Merveilleux d’Édouard Brasey, La Psychanalyse des contes de fées de Bruno Bettelheim, et Introduction à la littérature fantastique de Tzvetan Todorov.

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