

2ème Place - Il n'est jamais venu
La situation initiale
par Marine Haurillon
Ce matin, je suis parti. Pour toujours. J’en avais assez. Assez d’attendre. Attendre, encore et toujours. Quand on est enfant, on doit attendre. Toujours. C’est pour ainsi dire, la seule chose que l’on vous demande. Attendre, en patience, en silence. Et finalement, toujours attendre la venue de l’autre. Attendre que le soleil vienne pour aller jour dehors, attendre le père Noël pour avoir nos cadeaux, attendre à la sortie de l’école nos parents, attendre que les autres arrivent, attendre pour manger, attendre, attendre, attendre. Attendre d’être grande pour enfin apprendre, pour enfin comprendre.
Ce matin, j’ai compris, je suis partie. Cela veut-il dire que j’ai grandi ? Peut-être. Quand j’étais petite, ma grand-mère que j’adorais était la première à me demander d’attendre. Et donc j’attendais. Avec elle. Je ne savais pas très bien ce qu’on attendait toutes les deux : mais je sais qu’elle avait attendu longtemps. Et j’ai grandi, et j’ai compris. Elle avait passé sa vie à attendre. Attendre que son père rentre de la ferme, que son mari rentre du travail, que ses enfants rentrent à la maison. Attendre. Mais pas seulement après éléments triviaux. Non, ce que j’ai compris, c’est avait attendu toute sa vie, ce que tous nous espérons : le changement. Un bouleversement. L’élément perturbateur à une situation initiale bien trop longue pour le récit de votre vie. Point de péripétie sensée sans ce déclic, ce grain de sable dans l’engrenage, point de paroxysme, point de succès. Elle devait attendre ce qui donnait un sens à sa vie. Toute sa vie.
Et il n’est jamais venu.
Ce matin, elle est morte, j’ai compris, je suis partie. Voilà. Je n’attendrai pas, je pars. C’est fait. L’attente a pris fin. Le premier acte a pris fin. L’histoire commence. Heureusement qu’IL n’est jamais venu pour elle, sinon, je ne serais jamais partie. Mais ça y est. Là commence l’histoire de ma vie, de nombreuses péripéties, montant jusqu’au paroxysme final, où tout rentre dans l’ordre, avant que ça ne soit fini.
Alors, vous voulez connaître la suite ?