

Labyrinthe
​
texte n°1 : Blanc
par Feunard
Me voici encore dans ce lieu étrange. Tout blanc. Froid. Anormalement régulier. Je ne sais pas où aller, où il faut que j’aille. Je sais juste que j’ai faim. C’est tout. J’ai très faim. Je sais que, dans ce genre d’endroit, la nourriture tombe toute seule. Et se trouve dans des endroits accessibles, d’une manière ou d’une autre. Alors je cherche. J’essaye de sentir où elle est, mais les murs perturbent mes sens. Et tous ces chemins… Je me perds.Je ne sais pas où aller. Cette voie est encore sans issue, comme toutes les autres… J’en ai assez. Mais j’ai faim. Alors je cherche, je cherche encore.
Je ne sais pas depuis combien de temps je suis ici. J’ai mal aux pattes. Je crois que j’ai exploré tout cet immense labyrinthe, mais toujours aucune trace de nourriture. Et impossible de songer à trouver une sortie : il n’y en aura pas. Les géants bipèdes ne nous en laissent jamais.
Soudain, j’entends un claquement sonore. Au loin, une trappe s’est ouverte : sûrement la nourriture ! Du coin de l’œil, j’aperçois les géants bipèdes m’observer, tenant d’étranges machines très bruyantes. Mais je ne leur prête pas attention, et je m’élance. Je cours, je fonce vers l’endroit où j’ai entendu le bruit. Je retrouve très facilement mon chemin : j’ai tant parcouru ces couloirs que je les connais par cœur.
Alors qu’enfin, je déguste cette nourriture tant attendue, j’observe autour de moi. Depuis que la trappe s’est ouverte, les murs sont devenus transparents. À côté de moi, un autre rongeur avance dans un labyrinthe parfaitement identique au mien. Mais lui a l’air tout perdu, même si la nourriture est là. Manifestement, il n’a pas eu le temps, comme moi, d’explorer le labyrinthe : il prend tous les mauvais chemins. J’aimerais l’aider, mais il ne me voit pas.
Je reporte alors mon attention sur les bipèdes gênants, qui me fixent d’un air satisfait. Et je ne comprends rien.
Pourquoi ? Pourquoi nous ont-ils arrachés à nos mères, puis enfermés dans de petites cages froides ? Pourquoi nous nourrissent-ils ? Pourquoi ne nous laissent-ils pas libres ? Pourquoi nous placer dans des salles plus étranges les unes que les autres, pour au final nous nourrir avec les mêmes choses dans nos cages ?
Ils nous appellent rats de laboratoire. Nous sommes leurs esclaves, leurs objets. Perdus dans un immense pays blanc, blanc comme la couleur de leurs habits, blanc comme la couleur de nos pelages…
​