
Interview : Tatyana Ramazzotti
Elodye H. Fredwell
1. Peux-tu te présenter en quelques lignes pour celleux qui ne te connaissent pas ?
Je m’appelle Tatyana Ramazzotti, j’ai 32 ans. J’ai fait des études en droit judiciaire privé, ainsi qu’en communication des organisations et management des ressources. À côté de cela, je suis streameuse à mes heures perdues (même s’il faudrait que je reprenne mes activités, mais en ce moment, le temps fuit vitesse grand V), ainsi que créatrice de bougies artisanales. J’adore les chats (et je voue un culte tout particulier à mon petit cœur de beurre aka Solal aka mon fils, ma bataille), même si je suis aussi “team chien”. Je suis Sagittaire ascendant Bélier et je déteste les choux de Bruxelles. Ah, et je vais bientôt devenir maman d'un petit bébé, qui pointera le bout de son nez durant le dernier trimestre 2023.
2. Le Labyrinthe de Théia a ouvert ses portes en 2022, peux-tu nous en dire un peu plus sur ton projet ?
Le Labyrinthe de Théia (LDT) est une maison d’édition qui se spécialise dans les genres de l’imaginaire (science-fiction, fantasy et fantastique), ainsi que le thriller/policier. J'y accepte la romance à condition qu'elle se mêle à l'un des genres précités. D’ailleurs, l’un de nos ouvrages à paraître est une dark romance policière.
J’ai toujours voulu travailler au milieu des livres, même si j’ai un peu trop tourné autour de ladite envie sans vraiment avoir le courage de me lancer avant, que ce soit au niveau des études ou au niveau professionnel. Pour la création, j’ai été accompagnée par le Pépite de l’université de Lille, ainsi que par mes professeur·e·s de faculté.
3. Comment ce projet est-il né ?
Il est né d'une envie un peu folle d'apporter ma pierre au combat social des auteur·ice·s (avec la problématique économique liée à une entreprise qui se doit aussi d'être viable), mais aussi à tous les autres combats de représentations : LGBTQIA+, minorités racisées, handis, etc. La littérature est éminemment politique, surtout la SFFF, et si le Labyrinthe peut, à sa façon, amplifier la voix des autres, alors on fonce avec plaisir.
Et puis, il est surtout né de questionnements, de rêves avec des personnes qui ne sont peut-être plus dans mon entourage aujourd’hui, mais m’ont portée, m’ont forgée d’une certaine façon. Sans ça, je n’aurais peut-être jamais franchi le pas du “simple rêve”.
4. Quel est l’enjeu majeur du Labyrinthe de Théia ?
Je crois qu’il y a plusieurs enjeux, mais si je devais en choisir un qui me tient à cœur, ce serait la contrainte écologique et sociale. Notre monde change brutalement et pas forcément dans le bon sens. Si les gens auront toujours besoin de se divertir, ils ont aussi besoin de se tourner vers des entreprises, des initiatives qui se rapprochent de ces valeurs, qui vont créer du sens. Je crois même qu’au-delà de tous les aspects que l’on peut mettre en avant chez LDT, c’est bien l’écologie qui me préoccupe le plus. J’en suis au point de réfléchir à l’optimisation des déplacements de mes auteur·ice·s pour les salons, pour que notre empreinte carbone soit réduite, tout en leur permettant d’être présent.e.s sur les événements littéraires, évidemment.
5. Comment vois-tu l’avenir de l’édition : vis-à-vis de l’écriture, des genres littéraires, des représentations… ?
L’avenir de l’édition, pour moi, c’est principalement du côté des représentations et des combats que ça va se jouer. L'édition change avec son temps et au fil des combats qui l'émaillent. C'est encore compliqué parfois, on le voit avec certaines maisons qui se prennent des backlash sur les réseaux sociaux (De Saxus, par exemple) ou même des auteur·ice·s qui sont pointé·e·s du doigt, parce que jugé·e·s/vu·e·s/considéré·e·s comme problématiques par les différentes communautés de lecteur·ice·s.
J'espère et je crois profondément qu'on trouvera plus d'ouvrages diversifiés, écrits par des auteur·ice·s concerné·e·s, qui seront mis·es en lumière de manière respectueuse. Mais le chemin sera vraiment long, car les consciences, même si elles ont bien changé en dix ans, doivent encore être travaillées, déconstruites.
6. Quelle est la place des auteur·ice·s et des autres membres de l’équipe au sein du Labyrinthe de Théia ? Qu’est-ce que tu as voulu mettre en place pour participer à une édition plus respectueuse ?
Les auteur·ice·s ont une place plus importante dans le cheminement de leurs livres. Si j’ai le dernier mot concernant la couverture, car elle se doit d’avoir une cohérence marketing en rapport avec le genre littéraire qu’elle représente, les auteur·ice·s ont tout à fait le droit (et je les encourage vivement à ce sujet) à dire s’iels aiment ou pas la couverture. Je pars du principe qu’il est extrêmement compliqué de défendre un ouvrage dont on déteste l’emballage extérieur, même si c’est le produit de longs mois de travail. Ce constat est d’ailleurs partagé par d’autres auteur·ice·s, déjà édité·e·s et parfois même dans de grandes maisons d’éditions comme Bragelonne.
Pour les autres membres de l’équipe, chacun·e a sa place. Elle est bien définie, même si, parfois, les frontières s’ouvrent facilement. Notre maquettiste, par exemple, qui est chef de projet dans la vie salariale, apporte son expertise sur le maquettage de la couverture. Son expérience dans le monde de l’imprimerie est d’ailleurs un savoir précieux (et je l’en remercie encore). Notre correctrice est sollicitée à raison pour les livres, mais nous l’engageons aussi parfois pour d’autres textes : articles de blog, contrats d’édition, etc. Quant aux membres du Comité de Lecture, iels savent à quel point leur place est primordiale. Sans elleux, nous aurions plus de difficultés à découvrir ce que nous considérons comme des petites pépites.
Chaque membre de la maison d’édition est un maillon essentiel de son fonctionnement, de l’auteur·ice à l’éditrice, et nous nous engageons au respect, à la bienveillance et la bonne entente au maximum. Nous prônons et encourageons aussi le dialogue et la communication entre nous, afin d’avancer dans la même direction, sans laisser personne sur le carreau.
7. Pourquoi la mythologie grecque ? Une raison particulière ?
Parce que ça sonne bien ? Non, plus sérieusement, c'est venu quand il a fallu que je réfléchisse au nom de la maison d'édition. Je séchais énormément et ça a été une plaie de trouver quelque chose, d'autant que, dès que j'avais une idée, elle était trop semblable à une autre structure déjà existante. Ensuite, j'ai eu le déclic en lisant le fil d'Ariane d'un site internet. Je voulais au départ utiliser plusieurs mythologies, pour le nom des collections notamment, mais j'ai craint les accusations d'appropriation culturelle. J'ai donc préféré m'en tenir à la mythologie grecque.
8. Quels sont les projets pour la maison d’édition pour cette année 2023 ? Peux-tu nous teaser quelques projets à venir ?
Un nouveau roman de fantasy sortira fin juin 2023. Au travers de son personnage principal et de sa quête initiatique, l'autrice aborde des thèmes forts, comme les violences faites aux femmes, la manipulation psychologique ou encore les relations toxiques. Et on y retrouve de la représentation queer également, au travers d'un certain personnage. C'est un roman un peu particulier dans son écriture, qui le sera un petit peu dans sa mise en page, mais que j'affectionne énormément pour son originalité (j’ose le croire aussi).
Ensuite, c'est une dark romance policière qui sortira fin septembre 2023 et dans laquelle on y retrouvera également de la représentation queer.
9. Un dernier mot ?
« Pour accomplir de grandes choses, il ne suffit pas d'agir, il faut rêver ; il ne suffit pas de calculer, il faut croire. » Anatole France.
Elodye H. Fredwell
